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Il faut cultiver son jardin – La douce philosophie de Voltaire

« Il faut cultiver son jardin » s’écria Candide à Pangloss à la fin du célèbre conte philosophique de Voltaire dans une interjection supposant une réflexion à mi-chemin; entre le véritable jardinage et la psychologie positive

Candide ou l’Optimiste renvoie une véritable leçon de vie qui nous explique le sens de la vie; comment s’en réjouir et que finalement « tout va bien quand tout va mal. »

Voltaire, ou comment cultiver notre jardin

Tout le monde connaît ou du moins à déjà entendu parlé de Voltaire comme étant peut-être le génie le plus populaire et le plus distinctif de la littérature française.

En revanche, peu on approfondi ses œuvres, son comportement, sa réputation humaine et son histoire d’écrivain en général. Au cours de ses nombreux éclats et de son atypisme profond, dans son ouvrage Candide; Voltaire a ouvert l’esprit du monde en se basant sur une légende qui; comme toutes les légendes; est un réseau inextricable de réalité et de désir, de faits et de passions, d’exagérations intentionnelles et de silences gracieux. 

Il faut cultiver son jardin était une philosophie de vie qu’il entretenait lui-même.

Pendant qu’il son existence, il régna sur la littérature française et même européenne, principalement à travers ses tragédies. Il se concerna lui-même dans la plupart de ses pièces tout au long de sa vie. En revanche, ses derniers descendants n’y virent guère plus que de pâles copies des grands classiques français légèrement améliorés avec une touche à la Shakespeare. 

Pourtant, si tout cela est déjà obsolète et ne peut servir de base à la réputation constante et à l’appréciation finale de Voltaire; qu’est-ce qui le rend si populaire, si intimement connu dans son pays et à l’étranger ? 

Voltaire, l’excentrique 

De son nom François-Marie Arouet, Voltaire est né à Paris le 21 novembre 1694.

Il fut et est toujours considéré comme étant un brillant écrivain, historien et philosophe français, mais également un véritable révolutionnaire.

Son père était notaire, il a perdu sa mère très tôt. Il a étudié au Collège des Jésuites à Paris et a visité le Temple des Libertins. Son humour amer le rendit à la fois populaire et ridicule, lui causant des déboires bien embarrassants. La fois de trop, il fut exilé par le prince d’Orléans puis enfermé à la Bastille pendant un an. 

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En 1718, sa tragédie, Œdipe, fut un véritable succès, puis il a écrit une épopée sur Henri IV. Suite à ce deuxième succès, il reçut une rente du vieil homme et devint poète de la cour. En tant que partisan du cercle des Lumières, sa croyance en la puissance de la raison; ses vues déistes, ont parfois choqué et secoué les traditions de l’époque. 

En 1726, Voltaire entre en collision avec un noble. Il est de nouveau enfermé quelques mois puis exilé. Il se rend en Angleterre, où il est saisi par le succès du libéralisme anglais; des débats religieux et de la science. 

Une vie trépidante centrée sur lui-même

De retour chez lui en 1729, il imite Shakespeare avec ses drames (Eriphyle, Brutus…). Dans ses lettres philosophiques, il fait l’éloge des relations anglaises; de la patience religieuse; de l’épistémologie de Locke et de la physique de Newton. Chamboulant les préceptes de l’époque, son livre fut interdit et brûlé. Pour ne pas être poursuivi, il trouva refuge dans le château de Madame du Châtelet à Cirey où il devint aussi la compagne de cette dame. 

À partir de là, Voltaire fréquente les Grands et courtise les monarques, sans dissimuler son dédain pour le peuple. Il correspond avec Frédéric II et effectue un voyage diplomatique à Berlin pendant la guerre de succession d’Autriche. 

À son retour, il est chargé d’être historiographe du roi; ce qui lui vaut de publier Le Siècle de Louis XIV et Le Siècle de Louis XV et l’Essai sur les mœurs qu’il a pu observer. Ces ouvrages considérés comme les premiers essais historiques modernes ont été guère appréciés.

En outre, la mise en lumière de sa pièce Mahomet, présentée en 1742; fut interdite en raison de son côté anti-catholique qui le fire définitivement quitter la cour. 

Cultiver son propre jardin

Au-dessus de tous ses drames et des échecs qu’il rencontre, Voltaire continue de cultiver son jardin.

il faut cultiver nos jardin Candide-ou-l-Optimisme eldorado

Pourtant les encyclopédistes Diderot et D’holbach n’ont de cesse de rabaisser le déisme de Voltaire; tandis que Rousseau est plus émotif et tempère les dires en stipulant que Voltaire est un philosophe incompris qui essaie de connecter la lumière et l’esprit. 

À la mort de Mme du Châtelet en 1749; Voltaire s’isola et accepta en 1750 l’invitation de Frédéric II à Berlin. Il se sentait bien au début, mais à cause de son pamphlet contre Maupertuis; le président de l’académie dut quitter les lieux précipitamment en 1753. 

En rentrant chez lui, il est capturé à Francfort. Depuis que le roi de France lui interdit de remettre les pieds à Paris; Voltaire s’installe à Colmar puis à Genève, où la Suisse devient sa nouvelle terre d’accueil.

Mais rapidement, le champion de l’intolérance refait surface après sa publication de l’article de Genève dans l’Encyclopédie.

Ses pièces de théâtre sont rapidement interdites à Genève, ce qui lui fait rompre son amitié avec Rousseau

Voltaire – Une vision candide et optimiste

Malgré la situation, Voltaire continue de cultiver son petit jardin. Au fil des années, il acquiert une fortune considérable dans des opérations spéculatives, grâce notamment à la vente d’armes. Ceci lui permet de s’installer en 1759 au château de Ferney et d’y vivre dans un grand confort.

C’est là qu’il rédige son œuvre la plus populaire, Candide. Bien qu’elle ne reflète pas le meilleur des mondes possible, comme le dit Leibniz, il reste un fervent croyant au bonheur avec le principe de toujours « cultiver nos jardins ».

Le roman Candide, non lié par la tradition, est donc le meilleur de toutes ses œuvres. Au cours d’aventures tragiques et amusantes, Candide parcourt le monde et transpose ses atroces épreuves pour en faire un conte philosophique dont la morale touche tous ses lecteurs, même les plus controversés.

À la fin de son parcours, Pangloss, avait-il raison en suggérant que ce qu’ils avaient vécu était sûrement le meilleur de tous les mondes possibles

Si tel est bien le cas, pourquoi y a-t-il tant de misère, qu’est-ce que la guerre et l’Inquisition; Qu’est-ce que la foi aveugle et la misère ? Que pouvons-nous faire à leur sujet ? 

La sagesse avec laquelle Voltaire ferme Candide est en apparence très simple: personne ne peut cultiver le jardin d’un autre, nous cultivons tous notre propre jardin; et le travail qui reste en suspens reste l’oeuvre de chacun.

Extrait du livre Candide « Il faut cultiver son jardin »

« Pangloss rappelait souvent à Candide : ‘Dans le meilleur monde possible, les événements sont toujours étroitement liés; car après tout si vous n’aviez pas été chassé d’un beau château à grands coups de pied dans le derrière pour l’amour de mademoiselle Cunégonde; si vous n’aviez pas été mis à l’Inquisition; si vous n’aviez pas couru l’Amérique à pied; ou si vous n’aviez pas donné un bon coup d’épée au baron; si vous n’aviez pas perdu tous vos moutons du bon pays d’Eldorado; vous ne mangeriez pas ici des cédrats confits et des pistaches. – Cela est bien dit, répondit Candide, « mais maintenant, mettons-nous au travail : cultivons notre jardin.» »

Voltaire dans « Candide ou l’optimisme »

Il faut cultiver son jardin

À travers ce roman, Voltaire cultivait ses idées de manière moderne, défendant en réalité les intérêts des paysans. 

Progressivement il a réussi à se faire comprendre et à inverser la vapeur. Sa renommée s’est répandue partout, des écrivains, des philosophes, des dirigeants correspondaient avec lui. 

Outre la politique et l’économie, son thème principal était l’église. « Criptez le honteux », a-t-il proclamé comme un adversaire des idées anti-humaines, du fanatisme et de l’inquisition qui avaient jadis brûlé son livre. « Je ne suis pas chrétien – pour que je puisse t’aimer davantage ».

En 1764, il écrivit l’ Alphabet philosophique, et ses pièces de théâtre de l’époque ouvraient la voie à la romance avec leurs thèmes exotiques et certaines scènes violentes.

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Une fin loin d’être tragique

En 1778, il est à nouveau reçu à Paris pour les répétitions de sa pièce où il a été accueilli avec admiration, mais il y décède le 30 mai avant sa première représentation. 

Il a été enterré à Scellières avant l’arrivée de l’interdiction de l’église. En 1791, il fut conduit au Panthéon pour y rejoindre son ami Rousseau. 

Son œuvre Candide reste encore de nos jours un roman percutant qui peut être facilement adapté à la culture de notre philosophie actuelle.

À travers ses écrits, et sa célèbre phrase « il faut cultiver son jardin », il offre une vision précurseuse de la force de notre pouvoir central. Chacun doit être le dirigeant de son propre chef; avec raison et sans être influencé par la foi des organismes ecclésiastiques ou universitaires autoritaires. 

Candide c’est aussi l’héritage (discutable) des Lumières. Dans ces brèves, il montre également qu’il est le premier apôtre à penser différemment : « Je ne suis pas d’accord avec lui, mais jusqu’à ma mort je défendrai son droit de parole. » 

Ainsi, Voltaire représente « pour tout un siècle et pour toute l’Europe, non seulement l’écrivain par excellence, mais bien plus encore; l’incarnation de la raison,;du progrès; de la science et de l’avenir », écrit Antal Szerb.

Ainsi la phrase qui termine Candide « il faut cultiver notre jardin » rappelle donc le travail (« cultiver« ) intérieur (« son jardin« ) permet de trouver sa place, dans la simplicité. On retrouve une nouvelle fois l’importance donnée à l’esprit critique, à la pensée par soi-même, qui ne cesse d’irriguer la philosophie.